Les 4 Royaumes
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Chronique numero 11 : songes Empty Chronique numero 11 : songes

Jeu 27 Fév - 13:14
Il serait bien oiseux de dire que je n’ai pas vécu auparavant, que l’âme n’a pas une existence antérieure.
Vous le niez ? — ne disputons pas sur cette matière. Je suis convaincu et ne cherche point à convaincre. Il y a, d’ailleurs, une ressouvenance de formes aériennes, d’yeux intellectuels et parlants, de sons mélodieux mais mélancoliques ;
une ressouvenance qui ne veut pas s’en aller ..
une sorte de mémoire semblable à une ombre, vague, variable, indéfinie, vacillante ; et de cette ombre essentielle il me sera impossible de me défaire, tant que luira le soleil de ma raison.

C’est dans cette chambre que je suis né.
Émergeant ainsi au milieu de la longue nuit qui semblait être, mais qui n’était pas la non-existence, pour tomber tout d’un coup dans un pays féerique, dans un palais de fantaisie, dans les étranges domaines de la pensée et de l’érudition monastiques,

Il n’est pas singulier que j’aie contemplé autour de moi avec un œil effrayé et vague que j’aie dépensé mon enfance dans les livres et prodigué ma jeunesse en rêveries ;

Mais ce qui est singulier, les années ayant marché, et le midi de ma virilité m’ayant trouvé vivant encore dans le manoir de mes ancêtres, ce qui est étrange, c’est cette stagnation qui tomba sur les sources de ma vie, c’est cette complète interversion qui s’opéra dans le caractère de mes pensées les plus ordinaires

Les réalités du monde m’affectaient comme des visions, et seulement comme des visions, pendant que les idées folles du pays des songes devenaient en revanche, non la pâture de mon existence de tous les jours, mais positivement mon unique et entière existence elle-même.

Moi, vivant dans mon propre cœur et me dévouant, corps et âme, à la plus intense et à la plus pénible méditation,

Réfléchir infatigablement de longues heures, l’attention rivée à quelque citation puérile sur la marge ou dans le texte d’un livre, rester absorbé, la plus grande partie d’une journée d’été, dans une ombre bizarre s’allongeant obliquement sur la tapisserie ou sur le plancher,

M’oublier une nuit entière à surveiller la flamme droite d’une lampe ou les braises du foyer, rêver des jours entiers sur le parfum d’une fleur, répéter, d’une manière monotone, quelque mot vulgaire, jusqu’à ce que le son, à force d’être répété, cessât de présenter à l’esprit une idée quelconque,

Perdre tout sentiment de mouvement ou d’existence physique dans un repos absolu obstinément prolongé, telles étaient quelques-unes des plus communes et des moins pernicieuses aberrations de mes facultés mentales, aberrations qui sans doute ne sont pas absolument sans exemple, mais qui défient certainement toute explication et toute analyse.

L’anormale, intense et morbide attention ainsi excitée par des objets frivoles en eux-mêmes est d’une nature qui ne doit pas être confondue avec ce penchant à la rêverie commun à toute l’humanité, et auquel se livrent surtout les personnes d’une imagination ardente.

Non seulement elle n’était pas, comme on pourrait le supposer d’abord, un terme excessif et une exagération de ce penchant, mais encore elle en était originairement et essentiellement distincte.

Dans l’un de ces cas, le rêveur, l’homme imaginatif, étant intéressé par un objet généralement non frivole, perd peu à peu son objet de vue à travers une immensité de déductions et de suggestions qui en jaillit, si bien qu’à la fin d’une de ces songeries souvent remplies de volupté, il trouve l’incitamentum, ou cause première de ses réflexions, entièrement évanoui et oublié ...


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